Il y a quelques jours, j’allai au musée. J’y vis une main absolument magnifique, elle était crispée et on aurait dit qu’elle tenait quelque chose d’invisible. Le gardien remarqua que j’admirais cette œuvre. Il vint me voir et me dit :
– Bonjour monsieur, saviez-vous que cette main est à vendre ?
– Non. Combien coûte-elle ? demandai-je.
– 25 euros. Vous voulez l’acheter ?
– Oui, pour ce prix-là, je suis intéressé.
Une fois mon achat effectué, je rentrai dans mon modeste appartement, au douzième étage. Mes vieilles jambes étaient fatiguées de monter cet escalier. Je posai ma sculpture sur mon meuble de salon et allai me coucher.
Cette nuit-là, je fis un rêve étrange qui me réveilla en sursaut. Une main horrible, laide, effrayante m’étranglait. Elle me serrait la gorge tellement fort que je ne pouvais me défaire de son emprise. Une fois réveillé, j’avais du mal à respirer, mon cœur battait à cent à l’heure. Calmé, je remarquai que mon œuvre était sur ma table de chevet et ma porte de chambre grande ouverte.
– Mais… Je suis sûr de l’avoir posée sur ma table basse. Et ma porte ? Que fait-elle ouverte ? Je dors toujours la porte fermée, pensais-je.
J’allai vérifier ma porte d’entrée : fermée à clé comme à son habitude. Je regardai attentivement, rien ne semblait avoir bougé. J’émis la conclusion que j’étais somnambule et je me recouchai.
La journée se passa normalement mais malheureusement ma nuit fut très mouvementée. Je refis mon horrible rêve et constatai les mêmes choses : ma porte ouverte et ma sculpture posée sur ma table de chevet. Je remis ma conclusion en question et je me recouchai en faisant semblant de dormir. Après quelques minutes, je crus voir un doigt bouger. Terrorisé, je ne pus me rendormir et fixai la main toute la nuit assis dans mon lit. Au petit matin, je posai l’œuvre sur ma table basse (avec maintes précautions) et je partis faire des courses. A mon retour, la main était décalée de deux bons centimètres. Sceptique, je regardai sur internet et découvris une vieille légende aztèque parlant d’une main semblable à la mienne. Elle serait vivante et aspirerait la durée de vie de son propriétaire. Hilare je pensai :
– Je deviens fou avec l’âge. Quelqu’un essaie sûrement de me faire une blague.
La nuit suivante se passa comme la précédente et cela continua encore deux jours de plus mais j’avais de plus en plus de mal à me lever ou à faire des choses simples. Je me sentais rapidement fatigué. Cette fois, je n’en pouvais plus, il fallait que je me débarrasse de cette sculpture. Je décidai d’abord de la rendre au musée mais ce dernier refusa. Je me rendis alors chez une antiquaire. J’entrai et je lui dis :
– Bonjour, je voudrais vous vendre cette main.
– Ce truc horrible, laid, effrayant ? me répondit-t-elle épouvantée.
– Oui, pourquoi cette sculpture ne vous plaît pas ?
– Non, je n’en veux pas, contra-t-elle.
– Et si je vous la donne ?
– Non plus, sortez et ne me montrez plus jamais cette horreur. JAMAIS !
Ce n’était pas ce refus qui allait me décourager. Je jetai la main par la fenêtre de mon appartement et allai me coucher. Encore ce rêve. Encore cette situation. Je n’avais presque plus assez de force pour me lever. J’allai à mon bureau et écrivis ce texte dans un ultime effort.
Manon